
Lecture commune avec Laila.
Alors là je suis bien embétée pour faire ce billet, cela n'a pas été le coup de coeur auquel je m'attendais. Je m'attendais à un livre coup de poing et j'ai été a peine soufflée.
Mais c'est peut-être de ma faute, j'ai peut-être gardée une certaine distance, une certaine froideur par rapport à ce livre, connaissant la fameuse scène. Par malchance, (je feuillete beaucoup les livres avant de me décider à les lire) je tombe sur la page 116 et là, évidemment je savais tout...
Mais il n'y a pas que ça...
Je m'attendais à de somptueuses descriptions de la nature sauvage de l'Alaska et j'ai été très déçue. Là aussi, lire ce livre après les superbes descriptions du livre de Hella S. Haasse n'était pas l'idéal.
Mais il y a aussi ce style assez terne et l'histoire tout de même très répétitive : ils coupent du bois, ils chassent, ils pêchent... En bref il ne se passe pas grand chose.
Si encore il y avait eu une psychologie des personnages plus poussées, ça aurait pû racheter tout ça à mes yeux. Mais là aussi je suis restée sur ma faim.
Je ne dirais pas de ce livre qu'il n'est pas bon (loin de moi cette idée) mais tout simplement qu'il n'était pas fait pour moi !
La meilleuse chose que je puisse vous conseiller c'est d'aller lire des avis plus positifs, la majorité des billets que j'ai pû lire étaient bien plus enthousiastes.
Je pense que tout le monde (ou presque) connait maintenant le sujet de ce livre mais je vous donne tout de même la 4ième de couverture :
"Une île sauvage du Sud de l’Alaska, accessible uniquement par bateau ou par hydravion, tout en forêts humides et montagnes escarpées. C’est dans ce décor que Jim décide d’emmener son fils de treize ans pour y vivre dans une cabane isolée, une année durant. Après une succession d’échecs personnels, il voit là l’occasion de prendre un nouveau départ et de renouer avec ce garçon qu’il connaît si mal. La rigueur de cette vie et les défaillances du père ne tardent pas à transformer ce séjour en cauchemar, et la situation devient vite incontrôlable. Jusqu’au drame violent et imprévisible qui scellera leur destin.
Je pense aussi avoir ressenti une trop grande colère envers ce père pour pouvoir apprécier ce livre.
C'est vrai que, lorsque l'on connait l'histoire de l'auteur, le livre s'éclaire d'une autre façon. Je vous conseille d'ailleurs d'allez lire l'excellent interview qu'In Cold Blog a fait de l'auteur. Mais seulement après avoir lu le livre...
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L'histoire est, évidemment, bouleversante et cela est indéniable...

Voilà l'île de Sukkwan Island telle quelle est décrite au tout début du livre :
" Elle était blottie dans un fjord, une minuscule baie du Sud-Est de l'Alaska au large du détroit de Tvevak, au nord-ouest du parc national de South Prince of Wales et à environ quatre vingts kilomètres de Ketchikan. Le seul accès se faisait par la mer, en hydravion ou en bateau. Il n'y avait aucun voisin. Une montagne de six cents mètres se dressait juste derrière eux en un immense tertre relié par des cols de basse altitude à d'autres sommets jusqu'à l'embouchure de la baie et au-delà. L'île où ils s'installaient, Sukkwan Island, s'étirait sur plusieurs kilomètres derrière eux, mais c'étaient des kilomètres d'épaisse forêt vierge, sans route ni sentier, où fougères, sapins, épicéas, cèdres, champignons, fleurs des champs, mousse et bois pourrissant abritaient quantité d'ours, d'élans, de cerfs, de mouflons de Dall, de chèvres de montagne et de gloutons. Un endroit semblable à Ketchikan, où Roy avait vécu jusqu'à l'âge de cinq ans, mais en plus sauvage et en plus effrayant maintenant qu'il n'y était plus habitué. "
Ce qui m'a mise mal à l'aise et en colère,c'est que Roy, alors que cela devrait être l'inverse, porte à lui seul la responsabilité de son père :
" Ils partirent en direction de la crête, de nouveau exposés au vent. Roy luttait pour rester à la hauteur de son père et ne pas être séparé de lui. Il savait que s'il le perdait de vue l'espace d'une minute, son père ne l'entendrait pas crier, qu'il s'égarerait et ne retrouverait jamais le chemin de la cabane. Observant l'ombre noire qui bougeait devant lui, il prit conscience que c'était précisément l'impression qu'il avait depuis trop longtemps ; que son père était une forme immatérielle et que s'il détournait le regard un instant, s'il l'oubliait ou ne marchait pas à sa vitesse, s'il n'avait pas la volonté de l'avoir là à ses côtés, alors son père disparaîtrait, comme si sa présence ne tenait qu'à la seule volonté de Roy. Roy était de plus en plus effrayé et fatigué, il avait le sentiment de ne plus pouvoir continuer et il commença à s'apitoyer sur son sort, à se répéter : Je ne peux plus supporter ça."
Un autre exemple du père qu'est Jim :
"Ecoute dit son père. L'homme n'est qu'un appendice de la femme. Elle est entière, elle n'a pas besoin de l'homme. Mais l'homme a besoin d'elle. Alors c'est elle qui décide. C'est pour ça que les règles n'ont aucun sens et qu'elles changent sans cesse. On ne les établit pas ensemble.
Je ne suis pas sûr que ce soit vrai, fit Roy.
C'est parce que tu as grandi avec ta mère et ta soeur, et que je n'étais pas là. Tu es tellement habitué aux règles établies par les femmes que tu les trouves logiques. Cela te facilitera sûrement la tâche, mais ça veut aussi dire qu'il y a des choses que tu ne verras jamais clairement.
C'est pas comme si j'avais eu le choix.
Tu vois ? ça, c'est un exemple. J'essayais de faire passer un argument, mais tu l'as retourné pour me culpabiliser, pour me faire comprendre que je n'avais pas fait mon devoir, que j'avais enfreint les règles et n'avais pas été un bon père.
Eh bien, peut-être que tu ne l'as pas été. Roy commençait à pleurer à présent, mais il aurait voulu se retenir.
Tu vois ? fit son père. Tu ne connais que la manière féminine de te disputer. Tu chiales toutes les larmes de ton corps, putain.
Seigneur, fit Roy.
Peu importe, dit son père. Il faut que je sorte d'ici. Même si une putain de tornade souffle dehors, je vais marcher un peu.
Il enfila son équipement, Roy faisait face au mur et s'efforçait de calmer ses pleurs, mais il ne pouvait plus s'arrêter tant la situation lui semblait injuste et brutale. Il pleurait encore après le départ de son père, puis il se mit à parler à haute voix. Qu'il aille se faire foutre. Putain, va te faire foutre, Papa. Va te faire foutre. Ses sanglots redoublèrent et il émit un étrange couinement en essayant de les ravaler. Arrête de chialer, putain, dit-il.
Il s'arrêta enfin, se lava le visage, mit une bûche dans le poêle, s'allongea dans son sac de couchage et lut. Quand son père revint, plusieurs heures s'étaient écoulées. Il tapa ses bottes contre le porche, rentra et ôta son équipement, puis il s'approcha du poêle et prépara le diner.
.../...
Et je ne vais pas m'excuser, dit son père. Je le fais trop souvent.
OK."

(Photos magnifiquestrouvés ici)
Je vais donc, de ce pas, lire le billet de Laila.
Rajout : il faut que vous alliez la lire, elle en a fait un très beau billet !
Sukkwan Island
David Vann
Editions Gallmeister
