Gros coup de coeur
Lecture commune avec
Valérie, Théoma , Aifelle
Aymeline, Miss Orchidée et Hélène (petite précision : je poste
ce billet ce soir, avec quelques heures d'avance parce que je ne serais pas là, demain, de la journée)
Mot de l'éditeur :
"C’est en 1956, à Cambridge, que Sylvia Plath fait la connaissance du jeune Ted Hughes, poète prometteur, homme d’une force et d’une séduction puissantes. Très vite,
les deux écrivains entament une vie conjugale où vont se mêler création, passion, voyages, enfantements. Mais l’ardente Sylvia semble peu à peu reprise par sa part nocturne, alors que le
“braconnier ” Ted dévore la vie et apprivoise le monde sauvage qu’il affectionne et porte en lui. Bientôt ses amours avec la poétesse Assia Wevill vont sonner le glas d’un des couples les plus
séduisants de la littérature et, aux yeux de bien des commentateurs, l’histoire s’achève avec le suicide de l’infortunée Sylvia.
Attentive à la rémanence des faits et des comportements, Claude Pujade-Renaud porte sur ce triangle amoureux un tout autre regard. Réinventant les voix multiples des
témoins – parents et amis, médecins, proches ou simples voisins –, elle nous invite à traverser les apparences, à découvrir les déchirements si mimétiques des deux jeunes femmes, à déchiffrer la
fascination réciproque et morbide qu’elles entretiennent, partageant à Londres ou à Court Green la tumultueuse existence du poète.
L’ombre portée des oeuvres, mais aussi les séquelles de leur propre histoire familiale – deuils, exils, Holocauste, dont elles portent les stigmates –, donnent aux
destins en miroir des “femmes du braconnier” un relief aux strates nombreuses, dont Claude Pujade-Renaud excelle à lire et révéler la géologie intime. "
« Écrire : lécher, panser ses plaies, interminablement, sans jamais cicatriser ? »
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Ma fascination pour Sylvia Plath n’est pas du tout nouvelle… Je me rappelle avoir déjà été attiré par sa vie, pas son œuvre à l’adolescence déjà. Alors, évidemment, je ne pouvais qu’être attiré
par ce titre là. Même si je n’avais jamais rien lu de l’auteur Claude Pujade-Renaud, je dois dire que j’ai beaucoup apprécié son écriture, sa fluidité. Les chapitres coulent tout seul. Et même si
plusieurs personnages prennent leurs voix on est jamais perdu.
J’ai adoré ce livre… Et plus encore…
Il fait partie de ces livres dont on a du mal à se détacher même hors de la lecture. Il ne me quittait pas. Quoi que je fasse de ma journée, dans mon quotidien, mes heures… Il ne me quittait pas…
J’y restais accroché comme une moule à son rocher. J’y pensais constamment…
Alors que le sujet n’est pourtant pas franchement joyeux (le destin de ses personnages n’est pas tellement enviable) il n’est en rien plombant… A aucun moment.
Et pourtant au départ j’étais un peu sceptique. Je l’ai déjà dit lors de ma lecture de Loving Frank, les lectures prenant source dans de vrais personnages me met mal à l’aise. Qu’en auraient
pensés les protagonistes ? Que pouvons nous savoir de leurs vies, de leurs aspirations, de leurs sentiments alors que nous n’avons que des évènements, des dates, des faits pour le deviner…
Mais malgré cet a priori, je me suis laissé embarquer…
Il y a beaucoup de voix qui se font entendre dans ce livre. Celle de Sylvia, de Ted mais aussi de la mère de Sylvia, le frère de Ted, la sœur d’Assia, bref je pourrais continuer ma liste encore
longtemps…
Tous ses personnages prennent corps et nous les suivons avec grand intérêt.
Je me rends compte que ce n’est , finalement, pas évident de faire ce billet, de parler de ce livre.
Peut-être qu’il touche trop de choses en moi.
Sylvia était une femme incandescente, elle brûlait la vie de toutes les façons, ne vivait que, et pour, la passion. Elle était vibrante, incroyablement vivante malgré la douleur et le noir qui
dormait en elle. Elle était entière, et se donnait à fond en tout ce qu’elle croyait. Mais ceci n’est finalement que ma propre version personnelle de Sylvia.
Que pouvons nous vraiment savoir, nous, simples spectateurs tout à fait extérieur à sa vie, de ses envies, de son ressentie personnel. Comme nous est personnel à chacun notre propre intériorité…
Parce que personne ne sait, au fond, ce qui se nous sommes vraiment. Et à cela se rajoute encore ce que pensons de nous même…
Alors que la réalité est simplement multiples avec de nombreuses facettes.
Mais je m’égare un peu là…
L’auteur quand elle fait parler le petit ami de Sylvia, juste avant Ted :
« Sylvia dévorait tout. Il m’est arrivé de ne pas me sentir au diapason de sa voracité, de son exaltation. »
Et quand elle fait parler la mère de Sylvia
« Sylvia avait joint un autre poème, évoquant une traversée tumultueuse de la Manche, où elle parlait de mer affamée. Un fauve affamé, une mer affamée, de quoi
a-t-elle faim, ma fille, ma Sivvy ? De quoi ne l’ai-je pas nourrie, comblée ? Quel est ce manque, qu’est-ce qui la dévore ? »
Il y a aussi dans leurs œuvres à tous deux, à Sylvia et Ted, un rapport extrême avec la nature, les animaux.
" Tous deux sont d'excellents marcheurs. Ils avalent les miles à grandes enjambées, quittent la route de Grantchester pour prendre à travers prés. S'arrêtent afin
d'écouter leur respiration spongieuse. Traversent une haie d'aubépines, lumineuse. Ted aide Sylvia à se dégager des ronces. Tout l'émerveille : les fleurs fragiles, la chute des pétales, les
traces d'insectes qu'il lui signale. Tiens, ici, un passage de renard. Comment le sais-tu ? L'odeur, et cette minuscule touffe rousse accrochée aux épines. Magicien, il lui désigne un univers
inconnu, là, juste à côté. Par la naiveté de son regard, elle le luii renvoie, plus frais, plus vrai. Il le savoure d'autant plus."
Beaucoup de leurs textes, à tous deux, auront rapport avec la nature...
Ted était un chasseur, il voyait des proies en toute chose, même, et surtout (il me semble) avec les femmes.
Sylvia, quand à elle, avait une passion pour les abeilles et d’ailleurs, dans leur maison de Court Greeen, elle aura des ruches. Mais cela, bien sûr, est en rapport avec son père.
Père dont elle n’a jamais pu se détacher d’ailleurs, elle l’a perdu trop tôt, n’a jamais pu (ou voulu) faire son deuil…
Il y a leurs longues promenades, l’osmose avec la forêt… Et entre ces deux là aussi, avant que ça ne se corse.
Il y a aussi un épisode plutôt drôle, avec des rencontres avec les ours de Yellowstone
« familiers, urbains…/… les ours ressemblaient à d’énorme gadgets en caoutchouc, ils se faufilaient avec agilité et rebondissaient, véloces, au milieu des tentes,
des caravanes, des boutiques et des installations sanitaires »
dont un en particulier, venu se restaurer dans leur voiture en pleine nuit (Sylvia fera d’ailleurs de cet épisode une nouvelle).
La rencontre avec un tamia, un écureuil d’Amérique qui a le même « regard ambré » que Sylvia.
Celle avec un cerf majestueux, prince de la forêt « cet être parfait, surgi de quels ailleurs ? »
Il y a aussi tout le long de ce livre une résonance avec l’œuvre de Sylvia Plath. Beaucoup de pages se rapportent à ses poèmes, son roman, ses écrits. Et il me semble que c’est un très bon choix
(et tellement juste) de l’auteur.
Et puis il y a cette maison de Court Green, les nombreuses pommes du verger, les mûres, les fraises d’un jardin nourricier et les truites que ted pêche dans la rivière avoisinante.
Mais il y a aussi l’humidité d’une région froide
« Bien que se balader soit devenu quasiment impossible, l’automne est excessivement pluvieux et les chemins boueux. Nuages bas, l’ardoise sombre des toits luisant
de la dernière averse, gouttières débordantes, crépitements métalliques et ruissellements sur les vitres à longueur de journée, l’obscurité nocturne avant même l’heure du thé, bottes, parapluies
et mackintoshs en permanence, laisser s’égoutter, faire sécher…»
et les difficultés à se faire accepter dans un petit village. Et ses habitants « qui ne peuvent concevoir que pondre des poèmes soit un travail » Habitants
qui acceptent mal une femme qui s’offre les services d’une femme de ménage trois fois par semaine et qui en plus dispose d’une machine à laver. Mais avec tout de même la chaleur, l’amitié et de
la sage femme, Winifred Davies, qui s’occupera de son accouchement, lors de la naissance du petit Nicolas. Et qui lui assurera un soutien réel.
Mais dans ce livre j’ai aussi découvert Assia, qui vivra dans l’ombre de Sylvia, dans le souvenir de Sylvia… Qui subira l’asphyxie, à vivre dans sa maison…
Pour un dernier passage : Ted, qui se refugie souvent, après la mort de Sylvia dans son bureau :
« Un bureau bien ajustée à se taille. Où elle éprouverait de la joie à écrire. Au calme, feuillages et pierres anciennes devant sa fenêtre. Une chambre à soi,
enfin, et une table, rien que pour elle. Où enfanter ces poèmes qu’il admirait. Solide, épaisse de deux pouces, conçue pour durer toute la vie et, de fait, elle avait duré toute la vie de celle à
laquelle elle avait été destinée…/…
Car sur ce bureau, écrit-il maintenant que la douleur a aiguisé la lucidité, la femme aimée se penchait « comme un animal à l’écoute de son propre mal ». Écrire
lècher, panser ses plaies, interminablement, sans jamais cicatriser ?"
Voilà, mon billet se commence et se finit par cette phrase qui dit tout il me semble…
Je n'ai pas du tout l'impression d'avoir donné toute la pleine mesure de ce livre magnifique...
J'espère tout de même avoir été suffisament persuasive...
Un indispensable à mes yeux…
Bien sûr, je ne vais pas m’arrêter là dans ma découverte de Sylvia Plath.
J’ai dans ma PAL bien au chaud : et
Et ce week end je me suis offerte, avec un bon qui me restait, ceci :
Vous n'avez pas fini d'entendre parler de Sylvia Plath par ici !!!
Challenge littérature au féminin.
Challenge petit bac, catégorie métier